1499
Lorsqu’il paraît en 1499, l’Hypnerotomachia Poliphili est un livre en avance sur son temps.
Plus de 170 gravures sur bois accompagnent le texte composé avec les plus beaux caractères typographiques de l’éditeur vénitien Alde Manuce, alors la référence absolue en matière d’éditions savantes des grands classiques de l’antiquité grecque et latine.
Seul ouvrage sorti des presses d’Alde avec un si grand nombre d’illustrations ce livre est une exception dans toute sa production éditoriale. Textes et images s’imbriquent pour raconter les aventures oniriques de Poliphile, amoureux de la nymphe Polia : on y découvre des hiéroglyphes, des ruines antiques, des jardins, un obélisque juché sur le dos d’un éléphant…
La mise en place typographique s’accommode aux illustrations comme sur cette page où Poliphile arrive devant trois portes (« gloria dei », « mater amoris » et « gloria mundi ») – trois promesses pour de nouvelles explorations.
Alde réussit l’exploit de superposer sur la gravure des inscriptions en caractères latins, grecs, hébraïques et arabes, une première dans l’histoire de l’imprimerie.
Ailleurs, les gravures se succèdent d’une page à l’autre, comme ici l’image du Triomphe de l’amour s’achève sur le feuillet de droite.
Visuellement, la narration se poursuit, alors que le texte imprimé s’achève sur les deux pages en cul-de-lampe, une élégante disposition typographique pyramidale, ancêtre des calligrammes.
Autre curiosité éditoriale, les 38 lettrines utilisées en tête de chaque chapitre forment un acrostiche qui dévoile le nom d’un frère dominicain, très probablement l’auteur du livre : POLIAM FRATER FRANCISCUS COLONNA PERAMAVIT ou « le frère Francesco Colonna aima intensément Polia ».
Une première traduction française paraît en 1546 à Paris dans la traduction de Jean Martin (traducteur notamment de Vitruve et de Serlio).
Le livre dispose désormais d’un frontispice, le sujet des illustrations est principalement le même, mais de nouveaux bois ont été gravés et le texte simplifié.
Radu Suciu