Homère

Iliade (Ilias latina)

XIVᵉ s.

Page 3 du ms, sur e-codices

Le Moyen âge a beaucoup rêvé sur la guerre de Troie : en témoigne l’immense et très influent Roman de Troie (fin du XIIe siècle).

Mais que savait-on alors de la geste homérique ? On ne lisait guère le grec, en Europe occidentale, avant le XIVe siècle, et l’Iliade et l’Odyssée n’étaient pas connues, du moins dans leur intégralité.

Hector, Ulysse, la belle Hélène…, tout cela était filtré et abrégé par des adaptations latines.

L’Iliade latine que voici, attribuée à un certain Baebius Italicus, remonte au 1er siècle après J.-Ch.

Le remaniement est radical : des 15693 vers de l’original grec, on passe à 1070 ! Si certains chants (surtout ceux du début) sont assez longuement racontés, d’autres sont réduits à quelques vers.

Le récit original a été digéré et profondément restructuré, l’intrigue a été dramatisée.

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Remonter à la source, écarter les intermédiaires pour restaurer les textes originaux dans leur version authentique : c’est aujourd’hui la priorité des philologues.

Les lettrés du Moyen âge avaient moins de scrupules.

Non seulement, ici, ils se contentent d’une version abrégée de l’Iliade, mais ils interviennent par toute sorte de gloses et de commentaires.

Dans le manuscrit de la Fondation Bodmer (XIVe siècle), de provenance italienne, peut-être napolitaine, l’apport savant des clercs, soucieux d’expliquer le texte, occupe une partie de la page, que ce soit entre les lignes ou dans les marges.

Ces notes sont probablement de plusieurs provenances et transcrites par plusieurs mains.

Aux commentaires savants s’ajoutent des fantaisies ornementales; voyez par exemple l’initiale I, figurée par le copiste comme une dame couronnée, vêtue d’une robe semée d’étoiles d’or et tenant une épée.

L’efflorescence marginale et interlinéaire de ce manuscrit demeure à étudier : espace ouvert à d’autres acteurs, dans le devenir, toujours en cours, de l’œuvre d’Homère !

Michel Jeanneret