Michel Jeanneret

« Tel qu’en lui-même enfin l’éternité le change »

L’auteur met un point final à son texte et l’envoie à un éditeur qui, le livrant au public, le fixe dans sa forme définitive. Ou encore : l’auteur meurt en laissant un ouvrage inédit ou inachevé, que d’autres se chargeront de transmettre, tel quel, à la postérité. Après la phase de gestation, pendant laquelle, malléable, il bougeait encore, voici le texte gravé dans le marbre, ne varietur.

Sous son air d’évidence, ce scénario est trompeur. Certes, le texte original doit être respecté et l’intention de l’auteur, reconstituée au plus près. Certes, ce qui a été écrit une fois pour toutes doit être transmis dans sa singularité, sa différence : c’est la condition pour que l’œuvre, venue d’ailleurs, élargisse l’horizon du lecteur. Mais s’il y a un seul auteur, il y a beaucoup de lecteurs ; s’il y a un seul texte, il y a beaucoup d’éditions. De l’origine unitaire à sa dispersion en multiples avatars interviennent des médiations et, avec elles, quantité de variations : des transformations, des détournements, qui font que l’objet premier, une fois échappé au contrôle de son producteur, continue à vivre et, d’un âge à l’autre, d’une culture à une autre, demeure actuel. La diffusion et la lecture sont des activités novatrices, et l’histoire des textes, quelles que soient les tentatives de fixation, se déploie comme une série de métamorphoses qui impriment à l’œuvre des valeurs inédites. Telle est l’évidence que cette exposition, et le livre que voici, voudraient illustrer, en montrant graphiquement, sur la page, les diverses traces d’intrusion des lecteurs et en distinguant les différents rôles qu’ils peuvent jouer dans cette relance. Éditer, commenter, illustrer, traduire, annoter, manipuler…, autant de gestes qui interfèrent avec l’objet primitif, mais ne l’altèrent que pour le garder en vie 2.

La part du lecteur

Si le classement des différents modes d’intervention et l’étude de leurs manifestations concrètes, dans la matérialité du livre, peuvent revendiquer une part de nouveauté3, l’idée générale de l’exposition – la part du lecteur dans l’avènement de l’œuvre – n’a rien d’original. Elle sort tout droit d’une avancée majeure de la théorie littéraire dans ces dernières décennies. Trois étapes se sont succédé, à travers le XXe siècle, qui ont déplacé le foyer du processus littéraire d’un pôle vers un autre. Jusque vers 1960 a régné l’auteur. Comprendre un texte, c’était remonter à sa genèse, reconstituer les conditions de sa production : la priorité était de connaître la vie de l’écrivain et son milieu, de mettre à jour ses intentions, d’expliquer ses choix, d’identifier ses moyens et ses fins… La bonne lecture, rétrospective, passait par l’histoire, condition nécessaire et suffisante pour assurer la juste intelligence de l’œuvre. Même si ces exigences n’ont rien perdu, à nos yeux, de leur pertinence, elles ont été contestées, parfois rejetées, en tout cas relativisées. La première critique, radicale, est venue du structuralisme qui, dans un retournement radical, a voulu balayer les circonstances historiques et biographiques, les données externes quelles qu’elles soient, au profit d’une analyse du texte et du texte seul. Le sens n’est plus à chercher en amont, il réside dans l’objet même, dans son -système interne. Corollaire : le structuralisme évacue l’auteur (on a beaucoup parlé, avec Michel Foucault et Roland Barthes, dans les années 1960, de la mort de l’auteur) et réduit le lecteur à un agent impersonnel, sans histoire ni états d’âme.

Mais ce texte isolé de tout contexte, ce lecteur idéal et abstrait allaient succomber, à leur tour, à un nouveau renversement – et ce fut, après la prééminence de l’auteur, après l’exclusivité du texte, la revalorisation du lecteur, promu comme un partenaire essentiel dans l’actualisation de l’œuvre. De simple récepteur anonyme et docile, il allait devenir un acteur à part entière, un destinataire qui coopère avec le destinateur pour déployer les virtualités latentes du message. Dès les années 1970, plusieurs mouvements simultanés allaient converger dans ce sens : l’esthétique de la réception lancée par l’École de Constance, avec Hans-Robert Jauss et Wolfgang Iser ; quelques linguistes et sémioticiens, parmi lesquels se distinguent Umberto Eco et son livre au titre significatif : Lector in fabula. Le rôle du lecteur ou la coopération interprétative dans les textes narratifs ; la mouvance du Reader Response aux États-Unis, ainsi que, venue également du monde anglo-saxon, la bibliographie matérielle, attentive aux marques laissées dans le livre par ses usagers.

Aux tenants d’une théorie fixiste – l’auteur détermine une fois pour toutes le sens de l’œuvre, ou le texte, en tant que système autonome, échappe aux variations des circonstances –, ces différentes écoles ont eu le mérite de rappeler que la lecture modifie son objet. Dès le moment où un texte se trouve capté dans l’orbite du lecteur, il est perçu selon un ensemble de paramètres qui diffèrent forcément des codes qui ont présidé à sa gestation. La fidélité absolue à l’œuvre originelle, à son intention et sa signification premières, est une vue de l’esprit. Quelque effort que l’on fasse pour respecter le projet de l’auteur et la lettre du texte, une certaine mesure d’actualisation et d’appropriation, donc une transformation, sont inévitables. Cette évidence repose sur une loi difficilement contestable : « La compétence du destinataire n’est pas nécessairement celle de l’émetteur »4. Les conditions dans lesquelles l’un écrit ne sont pas celles où l’autre lit : ils sont sur une autre longueur d’ondes.

On admet qu’une traduction est, de nature, infidèle, parce que la langue de départ et celle d’arrivée ne coïncident jamais exactement. Il en va de même entre l’œuvre première et la perception que peut en avoir, dans un environnement nouveau, le lecteur. Les altérations ne tiennent pas ici, ou pas seulement, à la langue, mais à quantité de facteurs qui, dans le passage du producteur au récepteur, prêtent au texte des significations nouvelles5. Je ramènerai ici les multiples agents possibles de cette reconfiguration à quatre causes majeures :

le temps. Un an, cent ou mille ans plus tard, le monde a changé ; l’attente du public, ses préoccupations, son équipement intellectuel ne sont plus les mêmes, et cette historicité de la lecture ne peut pas ne pas affecter la chose lue, comme Valéry, déjà, l’avait observé : « Le changement d’époque, qui est un changement de lecteur, est comparable à un changement dans le texte même, changement toujours imprévu, et incalculable »6. Le lecteur ordinaire se soucie-t-il même de connaître les conditions dans lesquelles l’œuvre a été, autrefois, conçue et reçue ? Il tend plutôt à l’inscrire dans l’actualité, son actualité.

l’espace. Il existe aussi, bien sûr, une géographie de la lecture. On ne lit pas Madame Bovary au Japon comme en France. Le changement de langue affecte le texte, mais aussi la culture ambiante, les traditions locales. La Déclaration des droits de l’homme a beau se dire universelle, elle ne revêt pas le même sens dans un régime totalitaire et dans une démocratie.

le facteur social. D’autres variations, dans la perception du texte, tiennent au degré de formation du lecteur, mais aussi à des paramètres comme l’âge, le sexe, la profession, l’environnement social7. Les contes de fées peuvent toucher des publics très divers – enfants ou adultes, lettrés ou non… –, mais tous les lecteurs n’y trouvent pas la même chose.

le facteur psychologique. Toutes les nuances des dispositions subjectives et des variations affectives entrent en compte, qui projettent sur le texte les couleurs de la psyché individuelle. Un livre est plus qu’un miroir, certes, plus qu’une occasion d’épanchement ou d’introspection, mais l’appropriation du texte dans l’espace intime n’en demeure pas moins une dimension, parmi d’autres, de la lecture.

Aucune œuvre n’échappe à ces déterminations, et c’est bien ainsi, puisque, s’il ne s’adaptait, un texte ne survivrait pas. Une sélection naturelle, sur le modèle darwinien, opère en histoire littéraire, qui distingue les textes capables de se renouveler d’un âge à l’autre, de faire sens d’un milieu à l’autre, et ceux qui, figés, sont voués à la disparition. Plus une œuvre inspire de lectures diverses, plus elle a de chances de durer : en témoigne le panthéon des classiques, peuplé d’auteurs que l’on n’a jamais fini d’interpréter8. Homère et Dante, Rimbaud et Mallarmé, Joyce, Kafka et Borges doivent leur actualité aux débats des cénacles savants – -autrefois les salons, aujourd’hui les classes, les revues – qui ne cessent de les interroger. Que seraient l’institution scolaire, les facultés des lettres, l’enseignement de la littérature sans -l’inépuisable fécondité des grands auteurs ? Inversement, que seraient les grands auteurs sans le bruissement incessant des commentateurs ?

l’interprétation infinie9

La Bible elle-même, dépositaire d’une Parole supposément immuable, connaît d’incessantes transformations. La lettre du texte sacré, déjà, est instable, non seulement parce que la tradition a pu corrompre la version originale, mais parce que les traductions, inévitablement, l’altèrent. Par-delà cette instabilité textuelle, les significations mêmes de la Parole divine varient au fur et à mesure des lectures. D’un âge à l’autre, d’une culture à l’autre, comme on l’a vu, les attentes changent, qui placent le message de la Révélation dans une lumière chaque fois différente et amènent le lecteur à chercher des réponses neuves. Ici comme ailleurs, le principe d’adaptation est vital. « Qui a déclaré de la Bible qu’elle était close ?, demande Novalis en 1799. La Bible ne devrait-elle pas être comprise comme étant toujours encore en croissance ? »10 Cette idée rejoint, jusque dans la métaphore qu’elle utilise, un thème commun de l’exégèse patristique : « Scriptura cum legentibus crescit »11 (« L’Écriture croît avec ceux qui la lisent »), déclare au VIe siècle Grégoire le Grand. Infiniment riche, elle s’adapte aux besoins des croyants, de la même façon que la manne tombée dans le désert avait paru bonne à chacun des Hébreux, quel que soit son goût12.

Ce sont donc les lecteurs qui font « croître » la Bible, et même à deux titres : parce que, au plan collectif, ils changent au fil de l’histoire, mais aussi parce que, au plan individuel, chacun peut approfondir sa lecture et découvrir progressivement, dans la Parole, de nouvelles valeurs. Plus un fidèle progresse dans la compréhension de l’Écriture, plus l’Écriture progresse avec lui. Cette croissance-là n’existe que dans la conscience du lecteur : elle est subjective. Mais Grégoire attribue à l’objet lui-même – le texte biblique – la capacité de croître. Le message divin change et s’adapte parce qu’en lui repose un potentiel – virtus, dynamis – qui s’actualise au fur et à mesure des besoins. De nouvelles significations germent qui, elles, sont objectives, dans la mesure où dès l’origine elles gisaient au cœur du texte.

L’interprétation de l’Ancien Testament comme -prophétie du Nouveau, dans la tradition chrétienne, illustre bien – et inspire sans doute – cette théorie. Si les exégètes ont pu découvrir dans les livres hébreux les signes de l’action du Christ, c’est que, depuis toujours, Dieu les y avait déposés. Et s’ils ont trouvé place dans le corps unitaire de la Révélation – le canon –, c’est qu’ils ont pu, dans l’Église, répondre à une attente nouvelle. De la même façon, la mythologie antique a survécu à la mort des dieux païens parce que, lue comme allégorie, elle a pu s’adapter au message de l’Évangile. Serait-elle restée figée dans ses valeurs premières qu’elle n’aurait pu traverser, comme elle l’a fait, le Moyen Âge et la Renaissance.

N’en déplaise aux historiens, notre histoire intellectuelle est jalonnée de lectures anachroniques, d’appropriations et de détournements. C’est aujourd’hui un lieu commun de dire qu’un auteur n’a pas toujours conscience des significations que peut revêtir son œuvre. Kant l’a dit, suivi de beaucoup d’autres : « Il n’y a rien d’extra-ordinaire à ce que […] on comprenne bien mieux un auteur qu’il ne s’est compris lui-même »13. Le « suffisant lecteur » qui, comme disait Montaigne, « découvre souvent és écrits d’autrui des perfections autres que celles que l’auteur y a mises et aperçues, et y prête des sens et des visages plus riches »14 ne trahit pas l’œuvre, il est son allié.

la coopération du lecteur

Plongé dans toute la variété du monde, placé sous tant de regards, le texte n’a pas d’essence une et permanente, mais une série d’existences qui se renouvellent au fil des actualisations. Il existe dans la mesure où il est perçu et pris en charge, il existe par et pour son lecteur. Énergie latente, promesse en puissance, il attend le partenaire qui l’animera, mettra en marche ses rouages et en dégagera du sens, du savoir, de la beauté. Encore dans la sphère privée, le texte désire devenir livre, et le livre, une fois lancé dans l’espace public, désire trouver des lecteurs. Comme une partition musicale ou une pièce de théâtre, il a besoin d’un intermédiaire qui lui donne vie. Ce médiateur doit certes accepter les contraintes qu’impose l’objet qu’il interprète, un objet qui a son identité propre et ne se prête pas à n’importe quelle manipulation. S’il résiste aux lectures abusives, arbitraires, et dicte les règles du jeu, le texte n’en dépend pas moins de celui qui, le mettant en lumière, lui imprime un visage nouveau.

De cette œuvre en attente, on peut dire qu’elle est comme une lettre qui ne s’accomplit qu’une fois lue et sollicite, sinon une réponse, du moins une attention, une action. Elle ne connaît pas ses destinataires, c’est vrai, mais elle les imagine, les invente, s’adresse à des inconnus qui, si incertains soient-ils, n’en sont pas moins néce-ssaires. Montaigne rapproche ses Essais de lettres dans lesquelles il aurait pu, sans grande différence, communiquer ses pensées15. Si grande est pour lui l’importance de la destination, de l’échange et de la coopération qu’il invoque aussi, pour son livre, le modèle du dialogue. Il lui arrive d’ailleurs, au fil de son discours, d’interpeller son lecteur, de l’associer à sa réflexion et de l’inviter à prendre position. « La parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l’écoute »16, écrit-il. Il aurait pu le dire de son livre, de tous les livres. Il sait que l’auteur n’est pas le seul propriétaire du sens et que les mots n’accomplissent leur trajectoire qu’une fois pris en charge par un récepteur.

L’auteur qui souhaite cette coopération dispose de divers moyens pour ouvrir au lecteur un espace où il puisse, à son tour, se mettre à l’œuvre. Je voudrais évoquer quelques-unes des stratégies utilisées pour susciter cette complicité. Deux solutions extrêmes se font face : laisser au récepteur la plus grande latitude, c’est-à-dire exposer l’œuvre à un avenir aléatoire, ou limiter au maximum les possibilités de lecture, afin de prévenir les déviations. Entre ces pôles, maintes transactions interviennent, qui modulent la part de la liberté et celle de la contrainte.

Laisser dans le livre des pages blanches et inviter le lecteur à les remplir, c’est une manière radicale de partager la tâche. Ainsi fait la Chronique de Nuremberg (1493) : parvenue, dans son histoire du monde, à l’époque contemporaine, elle s’interrompt et intercale six pages vierges ; à toi, lecteur, explique l’imprimeur, de poursuivre la chronique17. Gide ne fait rien d’autre à la fin de Paludes (1895) – un récit excentrique qui, tout au long, sollicite la collaboration du public. Qu’ils laissent blancs des feuilles entières, de grandes marges ou d’amples interlignes, livres savants et manuels scolaires peuvent aussi, dans l’espace du livre, ouvrir la place d’exercices, de notes personnelles ou de quelconques compléments.

Sans inscrire concrètement la place du lecteur dans la matérialité du livre, Érasme l’appelle à l’aide pour compléter et perfectionner son ouvrage. Engagé, pour recueillir et expliquer les Adages (1500-1536) des anciens, dans une recherche interminable, tant la matière est abondante, il souhaite que d’autres prennent la relève et, devenus des continuateurs, poursuivent la récolte : « Puisque la besogne est sans fin et contribue au bien général, pourquoi ne pas partager l’effort et terminer ensemble notre travail ? J’ai fait ma part et, fatigué, je transmets la torche. Qu’un autre prenne la succession »18. Enchaîner l’œuvre à son origine, à sa genèse individuelle, est un geste stérile et régressif ; le tropisme du livre est orienté vers l’aval, du côté du récepteur qui poursuivra la tâche et, à son tour, transmettra le relais.

Parmi les appels à la coopération les plus hardis figurent aussi les livres qui proposent aux lecteurs de choisir leur propre trajet. Ainsi Tristram Shandy (1760), qui se laisse lire dans plusieurs sens, Marelle de Julio Cortázar (1978), un récit-labyrinthe dont les chapitres peuvent être organisés en ordres différents ou encore quelques récits de Michel Butor, comme Boomerang (1978), qui entraînent le lecteur dans une topographie textuelle où s’ouvrent, savamment combinés, plusieurs itinéraires.

De façon moins provocante, beaucoup de livres modulaires, composés de morceaux discontinus, abandonnent à l’usager un matériel qu’il agence à son gré. Dictionnaires et encyclopédies, collections de poèmes ou de nouvelles, mélanges et anthologies peuvent se lire comme un tout, mais se laissent débiter aussi en unités indépendantes, ou recomposer selon un parcours librement tracé. La lecture linéaire, la moins probable, fait place à des prélèvements à la carte, où le lecteur est maître du jeu.

Si on peut construire son ordre personnel, on peut aussi, à partir d’un texte, produire davantage de texte. Raymond Queneau offre une matrice qui permet au lecteur industrieux de créer, par combinatoire, Cent mille milliards de poèmes (1961). Par-delà ces applications ludiques, l’idée d’une littérature potentielle, selon laquelle un texte fonctionne comme support, ou ressort, de multiples créations virtuelles, peut être extrapolée à un champ beaucoup plus large. Il suffit de penser à la pratique classique de l’imitation, qui invite le lecteur à chercher dans une œuvre le modèle, ou l’impulsion, d’œuvres nouvelles – ainsi Virgile qui trouve dans l’Odyssée et l’Iliade le modèle de son Énéide.

Livres à remplir, livres à construire : ces applications donnent une forme concrète, plus ou moins spectaculaire, à un phénomène plus général – la dynamique qui gît au cœur de la lecture littéraire. L’esthétique de la réception a forgé, dans les années 1970, la notion de Leerstellen pour nommer les « places vides » qui, dans le texte, doivent être comblées par le lecteur afin d’assurer la pleine compréhension du message. On n’en finirait pas d’énumérer les différentes catégories de « non-dit » ou d’inachèvement, les lacunes à combler qui déclenchent l’activité du destinataire. Les espaces à investir peuvent relever de la syntaxe du texte : des ellipses dans le tissu narratif ou logique, une composition fragmentaire ou digressive, des liaisons absentes et des bifurcations inattendues, toutes ces défaillances volontaires, dans la structure du discours, qui obligent le lecteur à reconstituer les chaînons manquants.

La littérature « difficile » place son public devant un défi comparable. Qu’il s’agisse d’allusions à éclaircir, de la protection délibérée, par l’hermétisme, d’un savoir réservé, ou d’une langue, d’un style complexes au point d’être obscurs, la résistance du texte fonctionne comme un catalyseur. Une œuvre attendait, retranchée dans ses défenses ; le lecteur qui en perce les énigmes s’impose comme un acteur essentiel dans l’avènement du sens.

le lecteur en liberté surveillée

La réhabilitation du lecteur, dans le processus d’avènement du sens, revêt une dimension socio-politique que les lendemains de mai 68 n’ont pas manqué d’exploiter. Un modèle s’effondrait – le producteur seul propriétaire de la vérité de l’œuvre –, pour faire place à une distribution plus « démocratique » des rôles. Au lieu que le récepteur soit réduit à une écoute soumise, il devenait un acteur capable d’initiative et jaloux de sa liberté. La lecture correspondait à un acte d’émancipation, elle pouvait même se poser comme un geste de résistance à l’égard des autorités institutionnelles, garantes de l’orthodoxie en matière d’interprétation.

C’est Michel de Certeau qui, dans l’Invention du -quotidien (1980), place le débat dans cette perspective idéologique. La lecture n’est pour lui qu’un aspect particulier du problème plus général de la consommation. Qu’il s’agisse de propagande politique, de publicité et de marketing ou de la diffusion de produits culturels, les destinataires sont d’ordinaire perçus comme des consommateurs passifs : proie docile, sans défense, aisée à manipuler. Mais le pouvoir est-il si inégalement distribué ? Certeau répond que les récepteurs sont moins soumis qu’on ne croit, moins naïfs et plus rusés. Même s’ils ne se rebellent pas ouvertement contre les idées ou les produits qu’on prétend leur imposer, ils conservent une certaine indépendance et, dans leur for intérieur, maintiennent une distance critique. Plus que seulement résister à la pression, ils peuvent s’approprier l’objet qui devait les assujettir, le façonner ou l’infléchir à leur manière. « Il est toujours bon de se rappeler qu’il ne faut pas prendre les gens pour des idiots »19, conclut Certeau sur ce point.

Cette manifestation d’indépendance est d’autant plus significative qu’elle s’exerce dans une marge étroite et doit composer avec de nombreuses contraintes. Le message lui-même impose bien sûr des limites à l’interprète : non seulement il dit ce qu’il dit et on ne saurait lui faire dire n’importe quoi, mais il programme la réception, il déploie les outils de la persuasion et de la séduction. La lecture qui ne respecte pas la singularité et l’altérité du texte risque de tomber dans l’arbitraire, et le lecteur qui n’écoute que soi, de succomber à un narcissisme stérile. Il n’y a pas intérêt à occulter ou défigurer les propriétés de l’œuvre : son apport le plus précieux tient peut-être à sa différence et au dépaysement qu’elle procure. « Un texte est plus intéressant par ce qu’il m’apporte que par ce que j’y importe »20.

Aux exigences qu’impose l’œuvre, à la résistance qu’elle offre et qu’il faut cultiver, s’ajoutent toute sorte de pressions externes qui elles aussi bornent la liberté du récepteur. La lecture n’opère pas dans une bulle. Elle est façonnée par un horizon d’attente culturel et social, on l’a dit, elle subit l’empire des modes, elle est la proie d’intérêts économiques ou politiques… Entre les forces qui travaillent à circonscrire ou manœuvrer la lecture et les énergies centrifuges qui tentent de s’y dérober, un équilibre se cherche, et c’est dans cette zone instable, quelque part entre la soumission et l’innovation, que se situe la pratique effective du lecteur.

Michel de Certeau voit dans l’institution scolaire et l’enseignement de la littérature le théâtre exemplaire de ce jeu de forces. D’un côté, les professionnels de la lecture qui, fiers de leur savoir et de leur méthode, pensent pouvoir identifier le sens du texte ou du moins canaliser l’interprétation. En face de ces initiés, des amateurs qui, sans rejeter nécessairement la compétence des maîtres, n’adhèrent pas entièrement à leurs conclusions. À l’autorité des uns répondent une créativité tâtonnante, la recherche d’échos plus intimes. Comme les apprentis-écrivains qui, autrefois, greffaient leurs innovations sur les modèles légués par la tradition, les apprentis-lecteurs insinuent leur voix, légèrement dissonante, dans le concert dominant. Cette lecture-là n’est pas redondante ni servile, elle est dynamique et créative.

Ma petite-fille, six ans, consomme une quantité déroutante de produits dont l’empire Walt Disney inonde le marché : versions stéréotypées, rudimentaires, des contes de fées et des anciennes légendes. Elle est, dans un sens, captive de manipulations commerciales qui exploitent les trésors du patrimoine pour servir des intérêts économiques. Mais l’usage qu’elle fait de cette marchandise n’est ni simiesque, ni docile, ni stérile. Elle s’empare de cette mythologie et, par l’imagination, la régénère. Recyclant les matériaux banalisés dont la bombardent modes et médias, elle invente une quantité d’histoires, une rhapsodie de variations fantasmatiques qui enrichissent sa vie intérieure. Bel exemple de lecture créatrice : réapproprié, le produit standardisé nourrit les rêves et contribue à structurer la personnalité.

Un texte ne véhicule pas seulement des informations et des idées, il soulève des émotions, il agit de multiples manières sur le corps et sur la psyché. Dans l’Enfer de Dante, Francesca da Rimini raconte comment, lisant avec son beau-frère, Paolo Malatesta, le roman de Lancelot et le récit de sa passion pour Guenièvre, elle succombe à la tentation et s’abandonne à son amant21. D’autres, à l’instar de Rousseau, cèdent au discours tentateur de ces livres « qu’on ne peut […] lire que d’une main »22. La lecture, certes, n’exerce pas toujours une tyrannie aussi impérieuse. Elle déclenche d’ordinaire des mouvements plus intimes, plus lents à s’extérioriser. S’ouvre ici un continent caché, plus ou moins clandestin : la nébuleuse des affects que vient ébranler la lecture. Nous sommes tous, peu ou prou, des Madame Bovary, lecteurs à l’œuvre, mais entraînés dans une activité souterraine, qui ne se laisse pas saisir dans les vitrines d’une exposition. Si l’on peut, dans une certaine mesure, établir les conditions dans lesquelles une œuvre a été produite, il est beaucoup plus difficile d’en contrôler, et même d’en connaître, la réception.

un moment privilégié : le seuil de la modernité

Le passage au numérique aiguise aujourd’hui l’attention que nous portons à la lecture et à ses mutations. Une autre révolution technologique, avec le développement de l’imprimerie, a changé jadis les pratiques de lecture et projeté la question sur le devant de la scène. À travers le XVIe siècle, les rôles du lecteur, aux différentes étapes de la production et de la réception d’un livre, se sont diversifiés et précisés. Ce n’est sans doute pas un hasard si l'ouvrage que voici et l’exposition qu’il accompagne ont été conçus par un spécialiste de la Renaissance. Il est significatif aussi que plusieurs des exemples les plus intéressants, les plus innovants et les plus extrêmes, d’intervention du lecteur dans le livre, remontent à cette période. Je voudrais, en un rapide survol, capter quelques postures de lecteurs à l’œuvre au seuil de la modernité23 – une histoire, on le verra, qui n’a pas perdu son actualité.

Un auteur en puissance commence par lire la plume à la main. L’acte d’écrire, comme l’acquisition du savoir, passent inévitablement, à la Renaissance, par la référence au -patrimoine antique. On ne crée pas ex nihilo, on imite, on trans-forme, on adapte les modèles. Qu’on penche pour la plus grande fidélité possible ou qu’on reconnaisse la nécessité d’un écart, qu’on insiste sur la continuité ou le changement, sur la possibilité ou l’impossibilité d’égaler les maîtres, on reconnaît que l’œuvre nouvelle ne peut être conçue et perçue que comme une variation sur tel paradigme classique. Mais s’il est impensable d’échapper à la tradition, il est absurde de se résigner à la répétition. Tout se joue donc dans le mouvement de la différence et, de l’ancien au nouveau, dans l’ampleur de la transformation.

Car les conditions, mille cinq cents ans plus tard, ont changé. À situation nouvelle, lecture nouvelle. Actualiser les chefs-d’œuvre du passé, leur découvrir une pertinence dans le milieu contemporain, ce n’est pas les trahir, mais reconnaître leur pouvoir d’interpellation et leur capacité à susciter du nouveau. Cette lecture est engagée, créatrice, tournée vers le présent et l’avenir. Puisque le maître a vieilli, le disciple peut prendre la relève et, sur la voix des autorités, greffer la sienne. Le travail d’actualisation l’amène à saisir mieux ce qu’est sa culture et ce qu’il est lui-même. Il prend conscience de soi dans la recherche de la différence, par l’écoute attentive, mais subjective et critique, des anciens. Il ne borne d’ailleurs pas son initiative à la lecture novatrice, au détournement fécond. S’il a le droit de transformer les modèles, pourquoi ne tenterait-il pas de les égaler ou même de les surpasser en réalisant une œuvre qui, dépendante et pourtant dissemblable, soutienne la comparaison ? La perfection des classiques peut avoir un effet inhibant, mais elle peut aussi susciter l’émulation et, par la force du défi, contribuer à l’émancipation de l’écrivain. Du Bellay recommande de s’approprier les grands auteurs, « se transformant en eux, les dévorant et, après les avoir bien digérés, les convertissant en sang et nourriture »24. La bonne lecture assimile le corps étranger, elle le naturalise en corps propre. Incorporer l’autre, c’est accéder à un mode d’être supérieur.

L’œuvre s’accomplit en se métamorphosant. Cette poétique de la relance n’affecte pas seulement les textes du passé, et ceux d’autrui, mais ceux-là même que l’on écrit. Un auteur de la Renaissance traite volontiers son œuvre comme un chantier en cours : se relisant, il la rouvre et la retravaille. À de très rares exceptions près, les manuscrits préparatoires, les ébauches et autres brouillons n’ont pas été conservés. Mais si les premières étapes de la genèse ont disparu, celle-ci peut continuer au fur et à mesure des éditions. Une opposition simpliste attribue au Moyen Âge la mobilité et à l’âge de l’imprimerie la fixité des textes. L’œuvre médiévale, transmise par des copistes ou des récitants, serait soumise à de constantes mutations, tandis que le livre imprimé, suspendant le travail de production, abolirait les fluctuations au profit d’ouvrages ne varietur. La tendance, au XVIe siècle, est au contraire de ruser avec les effets stabilisateurs de l’imprimerie et de préserver, dans une certaine mesure, la mobilité de l’ère du manuscrit.

Du côté des auteurs, on pense à Ronsard qui, sa vie durant, republie ses poèmes et, à chaque nouveau tirage, multiplie les variantes, amende les premiers jets, restructure les recueils, perfectionne son style, comme pour défier la fixité que semble imposer la publication. L’exemple de Montaigne, lui aussi, est bien connu. D’une édition des Essais à la suivante, il se relit et modifie son texte pour en fournir une version revue et augmentée. Son livre est un organisme en perpétuelle croissance, un système malléable qui, à chaque étape, se gonfle d’adjonctions, afin d’enregistrer une nouvelle pensée, une nouvelle expérience, le fruit d’une nouvelle lecture, marquant ainsi, dans les bourgeonnements de l’œuvre, l’effet du passage. De même que Montaigne recycle dans son ouvrage le texte profondément modifié des anciens, de même il remet son propre texte sur le métier, soustrait un produit réputé fini à la sphère des objets inertes pour le réintroduire dans le cycle actif de la production.

La pratique des imprimeurs de l’époque est elle-même moins fixiste, moins éloignée des variations de la tradition manuscrite qu’on ne pense ; loin de favoriser la fabrication massive de livres uniformisés, elle maintient dans la production imprimée, tout au long du XVIe siècle, une surprenante flexibilité. La tendance à publier de petits tirages et, si le marché l’autorise, à multiplier les éditions n’encourage pas seulement les variantes d’auteur, mais les interventions des correcteurs, des typographes qui prennent la liberté de changer tel mot, telle ponctuation, telle mise en page… L’instabilité du livre va même plus loin. Les mêmes acteurs peuvent bricoler et altérer le texte jusqu’à l’intérieur d’une même édition : la page de titre, la date sont les mêmes, mais tous les exemplaires ne sont pas nécessairement identiques. Cette versatilité dans la fabrication du livre oblige les bibliographes à distinguer une émission – un sous-ensemble dont tous les volumes sont équivalents, voire un spécimen unique – d’une édition – un ensemble apparemment uniforme, mais où ont pu se glisser des variantes. Tant de lecteurs sont à l’œuvre, dans la chaîne de production, que le texte peut changer à tout moment. La plasticité du livre est sans doute en sursis, au XVIe siècle, mais la résistance opposée à la reproduction mécanique d’un texte fixe demeure vivace.

Au moment où fléchit l’omnipotence de l’imprimé, nous retrouvons aujourd’hui, avec le numérique, la variance de l’écrit. Le traitement de texte, l’édition en ligne, les plates-formes de création collective assurent à la chose écrite une malléabilité dont auraient rêvé les savants à l’aube de la modernité. Les textes créés et conservés en ligne sont autant d’objets virtuels que les usagers actualisent et manipulent à leur gré. La conception de l’œuvre comme un mobile qui s’accomplit dans son devenir rassemble l’âge pré-moderne et l’âge post-moderne dans un idéal commun de plasticité qui ouvre à l’action du lecteur une ample carrière.

Il me reste à relever un dernier usage du livre, au XVIe siècle, qui démontre, à son tour, que les pratiques de la lecture numérique ne sont pas aussi nouvelles que l’on pense. La Renaissance, on le sait, a dû faire face à une profusion de connaissances sans précédent, un phénomène d’information overload qu’il a fallu gérer tant bien que mal25. L’une des solutions revient à débiter la masse des données en extraits, en fragments d’anthologie, dans l’idée que, si l’on ne peut embrasser l’ensemble d’un corpus, on ait au moins accès à des morceaux choisis. De nombreux livres, au XVIe siècle, se présentent comme des collections de pièces détachées, des mélanges d’unités brèves et amovibles parmi les-quelles l’usager peut se servir à son gré. À la façon des Adages d’Érasme dont il est question plus haut, ce sont des recueils de citations et de lieux communs, des réservoirs de bribes érudites, d’anecdotes… , destinés à circuler pour être remployés dans de nouveaux contextes.

Ces compilations ne se lisent pas du début à la fin. Le lecteur s’y déplace librement, il ouvre le volume où il veut, avance, recule, saute, invente son parcours et sélectionne ce qui l’intéresse pour composer son propre montage. À la différence d’un système linéaire, soumis à une succession (chrono-)logique, ce type de livre se présente comme un espace synoptique, dont toutes les parties sont simultanément disponibles. Ce type de répertoire n’est pas absolument nouveau, à la Renaissance, mais il se multiplie, exploitant les possibilités de la production et de la diffusion imprimées pour mettre à la disposition des lettrés un trésor de connaissances, une masse documentaire à la fois maniable et extensible.

Cinq cents ans plus tard, l’internaute affronte un défi et expérimente des solutions comparables. Il est confronté, lui aussi, à un afflux, ou un surplus, d’informations qui, comme le rappelle ici même Yves Citton, mobilisent son attention et exigent des filtres. Et comme au XVIe siècle, il tire parti d’une technologie nouvelle, à la fois pour accéder facilement à un trésor de connaissances et pour réduire cette richesse à des proportions humainement praticables. Le web offre une quantité phénoménale, et totalement indigeste, de données, mais propose aussi des expédients pour digérer et exploiter cette abondance – des moyens de sélection, des instruments de repérage, de filtrage (comme jadis les index) et toute espèce de raccourcis et d’abrégés. Autant la masse d’informations est immense, autant on a tendance à multiplier les modules brefs : extraits, résumés, comprimés de toute sorte. Des bribes de savoir jaillissent sur l’écran, que l’internaute peut détacher, enchaîner, combiner à sa guise. Comme les humanistes pouvaient le faire jadis dans leurs recueils de mélanges, il crée son propre trajet et, passant d’un hypertexte à un autre, parcourt librement les arborescences d’un savoir en morceaux. À travers les architectures composites et morcelées du web, nous renouons avec une histoire longue et des pratiques de lecture actives, inventives, que la domination de la lecture linéaire – le paradigme du récit continu – avait temporairement --marginalisées.

Une fois lancée dans l’espace public, l’œuvre commence une histoire imprévisible, entre les mains de lecteurs qui peuvent choisir de se dépayser en remontant à la source ou tendre au contraire à se l’approprier en y débusquant des valeurs nouvelles. Suivre un texte en aval, à travers ses avatars et ses rebondissements, ce n’est pas trahir le travail effectué en amont, mais rendre hommage à la créativité de l’œuvre, montrer comment, ranimée par ses lecteurs, elle vit, parle encore, éclaire le passé tout en se projetant dans l’avenir. Ce cheminement, intime ou diffus, demeure d’ordinaire immatériel et souvent insaisissable. L’exposition qu’accompagne ce livre a voulu rassembler quelques épisodes significatifs, quelques traces visibles, concrètes et sensuelles, de cette histoire, une histoire qui a duré et durera aussi longtemps qu’il y aura des textes à lire. |


Notes

  1. Stéphane Mallarmé, « Le Tombeau d’Edgar Poe ».

  2. L’auteur de ces lignes est un littéraire. Les livres et la -lecture dont il parle relèvent, pour l’essentiel, de la littérature, mais ne s’y -limitent pas.

  3. Les représentants de la biblio-graphie matérielle et les historiens du livre, en pays anglo-saxons, ont beaucoup développé cette recherche. Voir par exemple D. C. Greetham, Michael -Harris, H. J. Jackson, William H. Sherman, Roger Stoddard.

  4. Umberto Eco, Lector in -fabula […], p. 64.

  5. Les recherches sur l’histoire de la lecture se sont multipliées ces dernières décennies. Voir surtout les travaux de Roger Chartier.

  6. Paul Valéry, « Au sujet d’Adonis », p. 494.

  7. Voir Stanley Fish, Is there […].

  8. Voir Yves Citton, Lire […] et L’avenir […].

  9. Je reprends le titre d’une étude de Pier Cesare Bori, L’interprétation […], à qui j’emprunte, pour l’essentiel, la matière de cette section.

  10. Cité ibid., p. 115.

  11. Cité ibid., p. 5.

  12. Livre de la Sagesse, 16, 21. Un commentaire d’Origène a développé cette version d’Exode, chap. 16.

  13. Critique de la raison pure, cité par Bori, L'interprétation [...] , p. 122.

  14. Montaigne, Les Essais (I, 24), p. 127.

  15. « Et eusse pris plus volontiers cette forme à publier mes verves, si j’eusse eu à qui parler », Les Essais (I, 40), p. 252.

  16. Montaigne, Les Essais (III, 13), p. 1088.

  17. Voir plus bas, p. 181.

  18. Érasme, Adagiorum […] chiliades […], chap. « Les -travaux d’Hercule », -Paris, -Nicolas Chesneau, 1570, col. 590.

  19. L’Invention du quotidien. 1. Arts du faire, p. 255.

  20. Vincent Jouve, « Du miroir au mirage », p. 62.

  21. Dante, La divine comédie, « Enfer », v. 115-138.

  22. Jean-Jacques Rousseau, Confessions, livre I, p. 40.

  23. Ces questions sont développées dans Michel Jeanneret, Perpetuum mobile […].

  24. Du Bellay, La Défense et illustra-tion de la langue -française, I, 7.

  25. Voir Ann Blair, Too Much to Know.


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